Le Conseil d’état veille aux garanties procédurale et matérielle en droit des étrangers – référé suspension & refus de renouvellement de titre de séjour

Actualité 2020


                                                            

Le Conseil d’état, garant des droits des étrangers ?

Après avoir fait l’objet d’une décision portant refus de renouvellement de titre de séjour séjour et obligation de quitter le territoire, un requérant introduit un recours en annulation et un recours en référé suspension devant le Tribunal administratif.

Stratégie contentieuse classique en droit des étrangers.

Pourtant, ici, le Juge des référés déclare irrecevables les conclusions du requérant tendant à la suspension de la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour au motif qu’il a déjà formé un recours en annulation qui, lui, suspend l’exécution d’office de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Le Conseil d’état a été saisi et censure cette décision.

Le Juge des référés a entaché son ordonnance d’une erreur de droit en considérant que les conclusions tendant à la suspension des effets de la décision portant refus de séjour sont irrecevables et ne pouvait considérer que l’effet suspensif de la seule décision portant obligation de quitter le territoire français suffit à protéger ses droits.

Une telle position viendrait en effet à supprimer de manière quasi-systématique l’exercice d’une voie de droit, celle du référé suspension, par le ressortissant étranger.

Dans sa décision du 20 février 2020, deux principes essentiels protecteurs des droits des étrangers sont rappelés avec pédagogie par le Conseil d’état.

  • Le premier principe est d’ordre procédural 

Bien qu’une décision portant obligation de quitter le territoire français ne puisse être exécutée d’office avant que le Tribunal administratif n’ait statué en application de l’article L.512-13 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), le Conseil d’état considère que les conclusions tendant à suspendre une décision portant refus de séjour ou refus de renouvellement de titre de séjour doivent être déclarées recevables par le Juge des référés.

Le Conseil d’état rappelle ainsi que deux voies de droit sont ouvertes et distingue leurs objectifs et leurs effets :

  • Le requérant doit pouvoir demander l’annulation de la décision prise à son encontre par la voie du recours en annulation ;
  • L’exercice de ce recours suspend d’office les effets de la décision portant obligation de quitter le territoire français jusqu’à ce que le juge du fond ait statué ;
  • Le requérant doit aussi pouvoir bénéficier de la voie du référé suspension pour contester en urgence la décision portant refus de séjour ou le refus de renouvellement de titre de séjour qui reste une garantie procédurale essentielle pour la défense de ses droits ;
  • Si les conditions du référé suspension sont remplies, alors le Juge des référés pourra suspendre les effets de la décision portant refus de séjour ou refus de renouvellement de titre de séjour dans l’attente du jugement au fond.

 

  • Le second principe est d’ordre matériel ou substantiel

Réglant l’affaire au fond, le Conseil d’état rappelle les deux conditions à réunir pour obtenir la suspension d’une décision :

  • D‘une part, l’urgence doit justifier la suspension de la décision ;
  • D’autre part, il doit exister un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée

L’important est ici de retenir la portée générale de la décision rendue par le Conseil d’état qui a l’occasion d’appliquer une jurisprudence constante (CE, 14 mars 2001, n°229773).

La condition d’urgence est en principe présumée - « constatée » selon le Conseil d’état - dans le cas d’un refus de renouvellement de titre de séjour ou d’un retrait de titre de séjour.

Si ces principes n’apportent aucune nouveauté, il était essentiel que le Conseil d’état rappelle avec clarté la grille d’analyse à suivre par le Juge administratif lorsqu’il est saisi d’un référé suspension.

 

Référence :

CE, 17 février 2020, n°433503

 

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Allison BISHOP, Avocate au barreau de Paris

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