Le saviez-vous ?

Il n’y a pas que les bénéficiaires d’une autorisation d’urbanisme qui peuvent être poursuivis pénalement en cas d’infraction.

En effet, le droit pénal de l'urbanisme vise également les personnes physiques ou morales qui exécutent les travaux.

Comment ça marche ? Quelles sont les peines prévues pour les personnes physiques et les entreprises du bâtiment ?

 

Au titre de l’article L480-4 du code de l’urbanisme, constitue une infraction au droit de l’urbanisme :

  • Le fait d’exécuter des travaux sans autorisation (sans déclaration préalable, sans permis de construire, sans permis d’aménager ou sans permis de démolir) ;
  • Le fait d’exécuter des travaux sans respecter les prescriptions imposées par l’autorisation qui a été délivrée.

Ces infractions sont punies d’une peine d’amende comprise entre 1.200 € et, au maximum, 6.000 € par mètre carré de surface construite, démolie ou rendue inutilisable à l’issue des travaux.

L’article L480-4 du code de l’urbanisme indique expressément quelles sont les personnes pouvant faire l’objet de poursuites pénales en cas d’infraction au droit de l’urbanisme :

« Les peines prévues à l'alinéa précédent peuvent être prononcées contre les utilisateurs du sol, les bénéficiaires des travaux, les architectes, les entrepreneurs ou autres personnes responsables de l'exécution desdits travaux. »

Comme le code de l’urbanisme renvoie à l’exécution de travaux afin d’identifier la commission d’une infraction au droit de l’urbanisme, il y a lieu de réfléchir conformément au droit pénal général et de rechercher qui a participé personnellement à l’exécution des travaux constitutifs de l’infraction.

D’ailleurs, la jurisprudence permet de cumuler les responsabilités afin que des poursuites puissent être engagées contre plusieurs responsables : les bénéficiaires des travaux (I) et l’exécutant des travaux (II) (Cass., crim., 20 janv. 1981).

 

I / La responsabilité des bénéficiaires des travaux constitutifs de l’infraction

 

En pratique, lorsqu’une infraction au droit de l’urbanisme est commise, le maire de la commune où ont été réalisés les travaux dresse ou fait dresser un procès-verbal d’infraction qu’il transmet au procureur de la République qui pourra diligenter des poursuites.

Ce sont classiquement les bénéficiaires des travaux constitutifs de l’infraction qui font l’objet de poursuites pénales. Autrement dit, les occupants du bien construit sans autorisation ou les titulaires d’une autorisation qui n’a pas été respectée.

Cependant, même si dans les faits, les bénéficiaires des travaux sont quasi-systématiquement les seuls à être inquiétés, la responsabilité pénale en cas d’infraction au droit de l’urbanisme ne se limite légalement pas à eux seuls. En effet, il est possible que la responsabilité pénale des entrepreneurs qui ont réalisé les travaux soit engagée.

 

II / La responsabilité de l’exécutant des travaux constitutifs de l’infraction

 

A / L’engagement de la responsabilité pénale personnelle de l’entrepreneur

La Cour de cassation énonce clairement que l’entrepreneur exécutant des travaux constitutifs d’une infraction au droit de l’urbanisme engage sa responsabilité pénale :

« (..) alors que, d'une part, l'infraction réprimée par l'article L480-4 du Code de l'urbanisme est exclusive de toute question de propriété ; que les peines encourues pour les délits établis par ce texte ne peuvent être prononcées que contre les bénéficiaires des travaux et ceux qui sont responsables des travaux (…) » (Cass., crim., 19 avril 1995, n° 94-82.765).

A titre d’exemple, a été reconnu pénalement responsable un entrepreneur qui avait accepté de construire un bâtiment qu’il savait non conforme au permis de construire délivré (Cass., crim., 2 juin 1981, Léon, n° 80-94.438).

A noter qu’il ne s’agit ici que d’une responsabilité pénale personnelle dès lors que c’est l’entrepreneur, personne physique, qui a exécuté les travaux constitutifs de l’infraction au droit de l’urbanisme.

 

B / L’engagement de la responsabilité pénale de la personne morale

Depuis la loi du 2 juillet 2003 relative à l’urbanisme et à l’habitat et l’ordonnance du 8 décembre 2005, l’article L480-4-2 du code de l’urbanisme permet d’engager la responsabilité pénale des personnes morales à l’origine d’une infraction au code de l’urbanisme.

Ainsi, lorsqu’une infraction au code de l’urbanisme est commise pour le compte d’une personne morale par leurs organes ou représentants, la responsabilité pénale de l’entreprise peut être engagée.

Dans ce cas, la personne morale encourt une peine d’amende dont le montant maximum peut être compris entre 6.000 € et, au maximum, 30.000 € par mètre carré de surface construite, démolie ou rendue inutilisable à l’issue des travaux, en application de l’article 131-38 du code pénal.

En outre, la personne morale encourt des peines complémentaires en application de l’article 131-39 du code pénal :

  • L'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, d'exercer directement ou indirectement une ou plusieurs activités professionnelles ou sociales ;
  • Le placement, pour une durée de cinq ans au plus, sous surveillance judiciaire ;
  • La fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans au plus des établissements ou de l'un ou de plusieurs des établissements de l'entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés ;
  • L’exclusion des marchés publics à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus ;
  • L'affichage de la décision prononcée ou la diffusion de celle-ci soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication au public par voie électronique.

Enfin, selon l’article 121-2 du code pénal, rien ne fait obstacle à ce que la responsabilité pénale personnelle de l’entrepreneur, personne physique, soit engagée en même temps que celle de la personne morale s’il s’agit des mêmes faits.

 

III / Conseils aux entrepreneurs

 

Avant de réaliser les travaux qui vous ont été confiés, assurez-vous :

  1. Qu’ils ont été régulièrement autorisés, en demandant la production de la déclaration préalable, du permis de construire, du permis d’aménager ou du permis de démolir 
  2. Qu’ils sont conformes aux prescriptions indiquées sur l’autorisation.