CE, 18 février 2019, n°414233

Un couple fait l’acquisition d’un terrain en considération d’un certificat d’urbanisme obtenu par le vendeur et attestant qu’il pourrait y réaliser une maison d’habitation.

Le permis de construire qui leur est délivré par la suite est annulé par le Tribunal administratif (annulation confirmée en appel), au motif qu'en dépit du classement partiel du terrain d'assiette par le plan local d'urbanisme en zone UEb, où est autorisée la construction d'un habitat de faible hauteur, il méconnaissait les dispositions du III de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, qui interdit les constructions sur la bande littorale en dehors des espaces urbanisés.

Les acquéreurs ont saisi le Tribunal pour demander la condamnation de la commune à les indemniser des préjudices résultants, notamment, de la délivrance du certificat d'urbanisme qui mentionnait que la parcelle était partiellement située en zone UEb alors que les juges avaient considéré qu’elle ne pouvait être regardée comme un espace urbanisé au sens du III de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme.

Le Tribunal administratif a condamné la commune à payer au couple de requérants la somme de 18.365,90 euros en raison de l’illégalité du permis de construire annulé. Saisi d’un pourvoi en cassation formé par la commune contre l’arrêt de la Cour administrative ayant confirmé cette décision et réévalué cette indemnité de 266.065,70 euros en raison de l’illégalité du certificat d’urbanisme, le Conseil d’État a eu l’occasion de rappeler qu’en vertu d’un principe général, l’autorité administrative ne peut jamais appliquer un règlement illégal.

Ce principe s’applique lorsque les dispositions d’un document d’urbanisme sont entachées d’illégalité et cela bien qu’aucune décision juridictionnelle n’en aurait prononcé l’annulation.

La commune ne peut donc se borner à reproduire sur un certificat d’urbanisme informatif les dispositions d’urbanisme applicables. Elle doit également s’assurer que celles-ci ne sont pas manifestement illégales.

Dans pareil cas, l’autorité administrative a alors l’obligation d’écarter d’elle-même ces dispositions et se référer aux dispositions antérieurement applicables ou, dans si cela n’est pas possible, à la réglementation nationale. Si elle ne le fait pas, elle peut engager sa responsabilité.

Dans la présent affaire, la haute juridiction a considéré qu’il ne pouvait être reproché à la Cour administrative d’appel d’en avoir jugé ainsi alors qu’il ressortait du dossier que le terrain litigieux avait été illégalement classé pour partie en zone UEb par le plan local d'urbanisme alors qu’il était situé dans la bande des cent mètres à partir du rivage qui ne saurait être regardée comme un espace urbanisé.

Le Conseil d’Etat a également précisé que la circonstance que le plan local d’urbanisme contenant la disposition litigieuse avait été approuvé par le conseil communautaire de la communauté d’agglomération ne faisait pas obstacle à ce que la commune soit reconnue responsable de la faute commise par son maire en délivrant un certificat d'urbanisme comportant la mention du classement illégal d'une parcelle par ce plan.

Il est ainsi clairement distingué la faute qui résulte de la délivrance du certificat d’urbanisme de celle qui aurait pu résulter de l'illégalité du plan local d'urbanisme de la communauté d'agglomération procédant à ce classement s’il avait été démontré l’existence d'élément de nature à établir que la commune avait commis une faute lors de l'élaboration concertée de celui-ci.

Enfin, s’agissant de la détermination du préjudice, le Conseil d’État a approuvé la Cour administrative d’appel d’avoir évalué le préjudice financier résultant de la baisse de la valeur vénale du terrain des propriétaires en retenant la différence entre son prix d'acquisition comme terrain partiellement constructible et sa valeur comme terrain inconstructible.

 

Giany Abbe

Avocat au barreau de Paris

42, rue Etienne Marcel – 75002 Paris

Tél. : +33 (0)1.53.00.85.90