Après avoir été admis(e) au concours de la première année de médecine, survécu aux ECN puis à l’internat, soutenu votre thèse et prêté serment, félicitations, vous allez ENFIN pouvoir négocier les conditions de votre exercice professionnel.

En effet, avant de soigner des patients, les vôtres, il est indispensable de conclure des contrats, lesquels doivent être – par définition – négociés.  

Si la négociation d’un contrat d’exercice libéral avec un établissement de santé, d’un contrat d’association entre soignants ou la rédaction des statuts d’une société requiert l’assistance d’un avocat aguerri dans ce domaine, celle de vos premiers – petits – contrats ne le nécessite rarement, bien que certains pièges soient à éviter et précautions à prendre :

  • Règle n° 1 : ne jamais signer un contrat les yeux fermés, sans le lire ou comprendre le sens des stipulations (au besoin en vous référant aux modèles de contrats disponibles sur le site du CNOM, bien qu’ils n’aient pas été mis à jour depuis plusieurs années) ;
  • Règle n° 2 : systématiquement vérifier qu’un contrat d’assurance couvre l’activité que vous exercez, même ponctuellement ;
  • Règle n° 3 : s’interroger à propos du secteur de conventionnement afin de ne pas perdre – à cause d’un contrat de courte durée – le bénéfice de votre secteur 2, lequel doit être impérativement déclaré lors de votre première installation en exercice libéral ;
  • Règle n° 4 : toujours transmettre une copie de votre contrat au Conseil départemental de l’Ordre des médecins parce que c’est obligatoire et que cela lui permet de contrôler sa conformité – notamment dans le but de vous protéger – afin de vous inviter à le modifier si cela est nécessaire ;
  • Règle n° 5 : le cas échéant, négocier sa rétrocession d’honoraires après avoir évalué quel sera le coût des services mis à sa disposition par le cabinet (locaux, matériel et secrétariat) et en tenant compte de l’assujettissement à la TVA (actuellement fixée à 20 %).

Enfin, pour déterminer quel type de contrat est le plus adapté à votre situation de jeune médecin, il convient de se référer à l’esprit de chacun de ces contrats, d’une part, et aux règles qui leur sont applicables, d’autre part :

  • la collaboration libérale :

Cette forme originale d’exercice, propre aux professions libérales, a été consacrée par la loi n° 2005-882 du 2 août 2005, laquelle s’applique de manière transversale à toutes les professions libérales (soignantes ou non), tout en étant adaptée aux spécificités de chacune d’elles pour tenir compte des réalités de leurs pratiques ainsi que de leurs règles déontologiques (à titre d’exemple, les médecins et chirurgiens-dentistes n’ont, en principe, pas le droit de travailler avec plus d’un collaborateur).

Le collaborateur doit impérativement être une personne physique (par opposition aux personnes morales que sont les sociétés) et il doit disposer de la faculté de se constituer une patientèle qui lui est personnelle.

Ainsi, le contrat a vocation à durer dans le temps pour permettre l’installation future du collaborateur (grâce à la patientèle qu’il aura constituée) ou préparer son association au sein de la structure existante, voire une succession.

Dans cet esprit, exclusif de tout lien de subordination, le droit du travail ne s’applique pas, ce qui a l’avantage d’offrir une grande flexibilité, mais de contraindre le collaborateur à supporter toutes les obligations qui pèsent sur les indépendants (tenir une comptabilité, s’assurer, régler ses cotisations aux URSSAF, à la caisse de retraite et à l’Ordre, payer de la TVA, financer sa propre formation continue…).

Autrement dit, il prépare progressivement et durablement le collaborateur à devenir un futur « chef d’entreprise », comme son patron.

  • l’assistanat :

L’assistanat – surtout utile à l’époque où la collaboration n’existait pas – est destiné à être de courte durée et/ou exceptionnel puisqu’il vise à pallier un afflux exceptionnel de population (tel que cela est observé dans les zones touristiques en période estivale) ou la fragilité de l’état de santé d’un praticien qui doit impérativement réduire son activité.

Ainsi, l’assistanat doit être préalablement autorisé par le Conseil départemental de l’Ordre, qui s’assurera que les critères pour y recourir sont remplis.

Le cas échéant, l’assistant viendra aider le praticien à son cabinet, dans des conditions similaires à celles d’un remplacement (cf. infra), mais sans qu’il soit nécessaire que son confrère soit absent. Ils peuvent donc exercer simultanément.

  • le remplacement :

Le remplacement permet à un praticien absent momentanément (congé, maladie, mission humanitaire…) de se faire substituer afin que la permanence des soins soit assurée, étant souligné qu’il est interdit que le remplaçant et le remplacé puissent exercer simultanément.

Il s’agit d’un contrat ponctuel et précaire, à l’occasion duquel le remplaçant n’a pas la possibilité de se constituer une patientèle personnelle et à l’issue duquel sa liberté de réinstallation est en principe réduite (pour éviter qu’il ne détourne la patientèle du remplacé).

Par ailleurs, l’esprit de ce contrat justifie qu’il bénéficie d’une grande flexibilité. Il n’est donc pas soumis au droit du travail, ni aux règles spécifiques de la collaboration (tel que les congés payés et d’accueil d’enfant). Ainsi, en tant qu’indépendant, le remplaçant doit supporter toutes les obligations inhérentes à ce statut (tenir une comptabilité, s’assurer, régler ses cotisations aux URSSAF, à la caisse de retraite et à l’Ordre, payer de la TVA, financer sa propre formation continue…).

Autrement dit, l’assistanat et le remplacement permettent aux jeunes médecins de travailler dans de multiples structures afin qu’ils puissent réfléchir aux conditions dans lesquelles ils souhaiteront exercer durablement avant de s’engager.   

  • la collaboration salariée : 

Ce contrat est peu flexible et généralement moins bien rémunéré, mais en contrepartie il libère le collaborateur de tous les inconvénients administratifs et comptables inhérents au statut des indépendants puisque l’employeur se charge notamment de payer les diverses cotisations.

Par ailleurs, le droit du travail étant applicable, le collaborateur bénéficie de ses protections et avantages (notamment en cas de licenciement).

Ce type de contrat convient parfaitement aux médecins allergiques au monde des affaires. 

(cf. le tableau récapitulatif des caractéristiques de chaque contrat -> https://sites.google.com/mylene-bernardon.com/avocate/publications?authuser=0#h.cj8enh5ig4zi )

Quoi qu’il en soit, en cas de doute sur le sens d’une clause, n’hésitez jamais à vous renseigner, au besoin en consultant un avocat aguerri dans ce domaine. Certains de vos Confrères plus âgés vous enseigneront que faire l’économie d’un conseil n’est jamais un bon calcul. A titre d’exemple, insérer une clause d’arbitrage, sans avoir estimé son intérêt dans votre cas, pourrait vous empêcher – de fait – d’obtenir la reconnaissance de vos droits.

 

Mylène Bernardon,

Avocate à la Cour