Le décret n° 2020-69 du 30 janvier 2020 relatif aux contrôles déontologiques dans la fonction publique pris pour application de l’article 34 de la loi du 6 Août 2019 de transformation de la fonction publique est entré en vigueur le 1er février 2020.

Celui-ci tire les conséquences de la reconfiguration amorcée par le législateur du contrôle des départs des agents publics vers le secteur privé et du remplacement de la commission de déontologie de la fonction publique par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique.

Le décret du 30 janvier 2020, applicable aux agents publics, à certains agents de droit privé d’établissement publics, y compris aux membres de cabinets ministériels, aux collaborateurs du Président de la république et des collaborateurs de cabinet de collectivités territoriales, exige de ceux-ci, lorsqu’ils souhaitent cesser temporairement ou définitivement leurs fonctions pour exercer une activité privée, d’une part d’informer préalablement par écrit leur hiérarchie et d’autre part, une fois l’autorisation accordée, de l’informer de tout changement d’activité durant une période de trois ans.

Par pragmatisme, le pouvoir réglementaire a prévu des procédures d’instruction différentes selon la nature de l’emploi occupé par l’agent et les risques déontologiques associés.

I. Un contrôle sous l’égide de la HATVP pour les agents occupant un emploi dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions le justifie.

Les agents occupant un emploi dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions le justifie, sont, pour le pouvoir réglementaire, ceux occupant des emplois soumis à l’obligation de transmission préalable d’une déclaration d’intérêts [2] ou de l’obligation de transmission d’une déclaration de situation patrimoniale [3] et d’une déclaration d’intérêts. Il s’agit pour l’essentiel d’emplois de direction.
Ainsi, dès lors que l’un de ces agents souhaite cesser temporairement ou définitivement ses fonctions pour exercer une activité privée, il doit en informer sa hiérarchie au préalable. Cette dernière devra saisir la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique (HATVP) dans un délai de quinze jours.

Un arrêté ministériel viendra déterminer la liste des pièces du dossier à transmettre à la HATVP. La HATVP pourra demander des informations complémentaires à l’agent, tout comme à l’autorité hiérarchique. La haute autorité aura pour charge d’apprécier si l’activité envisagée par l’agent est compatible avec les fonctions exercées au cours des trois dernières années, au regard des principes déontologiques (dignité, probité, indépendance, etc) et de l’interdiction de la prise illégale d’intérêt.

La saisine de la HATVP suspend le délai au cours duquel une décision implicite de rejet est susceptible de naître.

L’autorité administrative rendra sa décision dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l’avis de la HATVP, ou au terme du délai de deux mois suivant la saisine de la HATVP. Rappelons que l’avis de compatibilité, de compatibilité avec réserves, ou d’incompatibilité lie l’autorité administrative et s’impose à l’agent. Le silence gardé de la HATVP à l’expiration d’un délai de deux mois vaut avis de compatibilité.

En cas de méconnaissance de cet avis par l’agent, ce dernier s’expose à des sanctions.

Enfin, l’absence de saisine de la HATVP, le président de cette dernière peut s’autosaisir et en informe par écrit l’agent et l’autorité hiérarchique.

II. Un contrôle internalisé pour les autres agents.

S’agissant des agents occupant d’autres emplois publics, l’intervention de la HATVP n’est que subsidiaire. En effet, si l’agent est toujours soumis à l’obligation d’informer l’autorité hiérarchique de son projet, c’est en premier lieu à l’autorité hiérarchique d’effectuer elle-même le contrôle déontologique au cours duquel elle doit apprécier si le projet risque de compromettre le fonctionnement normal, l’indépendance ou la neutralité du service, d’affecter la probité de l’agent ou de l’exposer à un risque de conflit d’intérêts voire de prise illégale d’intérêt.

Lorsque l’autorité hiérarchique a un doute sérieux sur la compatibilité du projet avec les principes déontologiques et les fonctions exercées par l’agent au cours des trois dernières années, elle saisit sans délai le référent déontologue pour avis.

La saisine du référent déontologue ne suspend pas le délai de deux mois dans lequel l’administration est tenue de se prononcer sur la demande de l’agent. Ce n’est que lorsque l’avis du référent déontologue ne permet pas de lever le doute sur la compatibilité du projet avec les principes déontologiques, que l’autorité disciplinaire devra saisir la HATVP en transmettant l’avis du référant déontologue et selon la même procédure que pour les agents soumis obligatoirement au contrôle de la HATVP (cf I).

III. Une absence de contrôle a priori pour les agents ayant une faible ancienneté.

Enfin, le décret du 30 janvier 2020 exclu de tout contrôle a priori les agents contractuels de droit public de catégorie B et C employés de manière continue pendant moins d’un an par la même collectivité, tout comme les agents de catégorie A employés de manière continue depuis moins de six mois par la même autorité, ou depuis moins d’un an pour ceux ayant exercés des fonctions d’enseignement et de recherche .

Certainement le pouvoir réglementaire a-t-il considéré que leur faible ancienneté est susceptible de les mettre à l’écart d’un risque à venir de conflits d’intérêt notamment. Mais cette exclusion n’est pas pour autant une immunité accordée à ces agents. Si ceux-ci ne sont pas soumis au contrôle déontologique a priori, il n’en demeure pas moins qu’ils sont soumis aux obligations professionnelles prévues par le statut en vertu de l’article 32 de la loi du 13 juillet 1983 ainsi qu’à l’article L432-12 du Code pénal, et donc susceptibles d’être sanctionnées en cas de méconnaissance de telles règles.