Un récent arrêt de la CJUE du 14 février 2019 (affaire C‑345/17) est venu préciser les règles applicables dans l'Union européenne si un citoyen, pour critiquer son comportement, filme la police en activité et surtout diffuse les images.

Dans cette affaire, la Cour avait à faire application de la Directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil, du 24 octobre 1995, relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données.

Cette affaire, transposable en France, concernait un ressortissant letton qui se trouvait dans les locaux du commissariat de la police nationale, et avait filmé la prise de sa déposition dans le cadre d’une procédure d’infraction administrative. Il a voulu, par la publication de la vidéo en cause, attirer l’attention de la société sur une action de la police qu’il considérait comme illégale.

Pour la Cour, le fait qu’un citoyen ne soit pas un journaliste de profession n’apparaît pas de nature à exclure que l’enregistrement de la vidéo en cause ainsi que la publication de celle-ci sur un site Internet de vidéos sur lequel les utilisateurs peuvent envoyer, regarder et partager celles-ci puissent relever de cette disposition de la directive.

Par ailleurs, le fait que la diffusion se fasse sur Youtube ne saurait, en soi, ôter à ce traitement de données à caractère personnel la qualité d’avoir été effectué "aux seules fins de journalisme".

Selon la Cour, l’article 3 de ladite Directive doit être interprété en ce sens que « relèvent du champ d’application de cette directive l’enregistrement vidéo de membres de la police dans un commissariat, lors d’une prise de déposition, et la publication de la vidéo ainsi enregistrée sur un site Internet de vidéos sur lequel les utilisateurs peuvent envoyer, regarder et partager celles-ci. »

De même, pour la Cour, l’article 9 de la directive 95/46 doit être interprété en ce sens que « des circonstances de fait telles que celles de l’affaire au principal, à savoir l’enregistrement vidéo de membres de la police dans un commissariat, lors d’une prise de déposition, et la publication de la vidéo ainsi enregistrée sur un site Internet de vidéos sur lequel les utilisateurs peuvent envoyer, regarder et partager celles-ci, peuvent constituer un traitement de données à caractère personnel aux seules fins de journalisme, au sens de cette disposition, pour autant qu’il ressorte de ladite vidéo que ledit enregistrement et ladite publication ont pour seule finalité la divulgation au public d’informations, d’opinions ou d’idées, ce qu’il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier. »