4000 procès-verbaux dressés, et maintenant plusieurs garde-à-vue pour « mise en danger de la vie d’autrui » et même des comparutions immédiates pour « outrage » ou « rébellion »...
Même si la situation est particulière et appelle des mesures urgentes, ne serait-il pas utile de s’interroger sur la légalité des contrôles d’identités opérées et des infractions constatées ?
L’article 5 du projet de loi sur l’état d’urgence sanitaire, actuellement en cours d’examen au parlement prévoit notamment que « La déclaration de l’état d’urgence sanitaire donne au Premier ministre le pouvoir de prendre par décret pris sur le rapport du ministre chargé de la santé, les mesures générales limitant la liberté d’aller et venir, la liberté d’entreprendre et la liberté de réunion et permettant de procéder aux réquisitions de tous biens et services nécessaires afin de mettre fin à la catastrophe sanitaire mentionnée à l’article L. 3131-20 du Code de la santé publique. Ces mesures peuvent inclure l’interdiction du déplacement de toute personne hors de son domicile dans la zone géographique qu’elles déterminent ».
Le projet, envisage la création d'articles qui n'existent pas encore et notamment deux articles L3131-20 et -21 du CSP qui devraient prévoir que l'état d'urgence sanitaire pourait être déclaré par décret motivé qui "détermine la ou les circonscriptions territoriales à l’intérieur desquelles il entre en vigueur et reçoit application". Le projet prévoit encore un nouvel article L. 3131-23 du CSP selon leque "Dans les circonscriptions territoriales où l’état d’urgence sanitaire est déclaré, le Premier ministre peut, par décret pris sur le rapport du ministre chargé de la santé, aux seules fins de garantir la santé publique: 1° Restreindre ou interdire la circulation des personnes et des véhicules dans les lieux et aux heures fixés par décret ; 2° Interdire aux personnes de sortir de leur domicile, sous réserve des déplacements justifiés par des besoins familiaux, professionnels ou de santé impérieux ; 3° Ordonner des mesures ayant pour objet la mise en quarantaine, au sens de l’article 1er du règlement sanitaire international de 2005, des personnes susceptibles d’être affectées ; 4° Ordonner des mesures de placement et de maintien en isolement, au sens du même article 1er, à leur domicile ou tout autre lieu d’hébergement adapté, des personnes affectées ; 5° Ordonner la fermeture provisoire d’une ou plusieurs catégories d’établissements recevant du public, à l’exception des établissements fournissant des biens ou des services essentiels aux besoins de la population ; 6° Limiter ou interdire les rassemblements sur la voie publique ainsi que les réunions de toute nature ; ° Ordonner la réquisition de tous biens et services nécessaires à la lutte contre l’épidémie de covid-19 ainsi que de toute personne nécessaire au fonctionnement de ces services ou à l’usage de ces biens. L’indemnisation de ces réquisitions est régie par le code de la défense ; (etc.)"
Or ces dispositions n'existent pas encore, cette loi n’ayant pas encore été votée au 22 mars 2020.
Nous restons donc dans le cadre des dispositions existantes en vigueures et notamment sa Partie 3 du Code de la santé publique (CSP), intitulée "Lutte contre les maladies et dépendances" et surtout son Livre 1er ("Des maladies transmissibles") qui prévoit dans son titre 3 intitulé "Menaces et crises sanitaires graves", en son Chapitre 1 les mesures d'urgences à savoir que : "En cas de menace sanitaire grave appelant des mesures d'urgence, notamment en cas de menace d'épidémie, le ministre chargé de la santé peut, par arrêté motivé, prescrire dans l'intérêt de la santé publique toute mesure proportionnée aux risques courus et appropriée aux circonstances de temps et de lieu afin de prévenir et de limiter les conséquences des menaces possibles sur la santé de la population. Le ministre peut habiliter le représentant de l'Etat territorialement compétent à prendre toutes les mesures d'application de ces dispositions, y compris des mesures individuelles. Ces dernières mesures font immédiatement l'objet d'une information du procureur de la République. Le représentant de l'Etat dans le département et les personnes placées sous son autorité sont tenus de préserver la confidentialité des données recueillies à l'égard des tiers. Le représentant de l'Etat rend compte au ministre chargé de la santé des actions entreprises et des résultats obtenus en application du présent article."
Pourtant, un décret réglementant les déplacements pour lutter contre le virus covid-19 est entré en vigueur le 17 mars 2020. Ce décret crée une contravention de la 4e classe en cas de violation des interdictions ou en cas de manquement aux obligations édictées par le décret n° 2020-260 du 16 mars 2020 portant réglementation des déplacements dans le cadre de la lutte contre la propagation du virus covid-19, ainsi qu'en cas de méconnaissance des mesures prises sur son fondement. La procédure de l'amende forfaitaire est applicable. Le montant de l'amende forfaitaire et de l'amende forfaitaire majorée s'élèvent respectivement à 135 et 375 euros.
Il n’est donc pas inutile de s’interroger sur le fait de savoir si la restriction générale à la liberté de circuler est légale en absence de texte législatif pour le permettre, dès lors que L’état d’urgence sanitaire n’a toujours pas de fondement legal !
Par ailleurs, il faut vérifier la rédaction des procès-verbaux dressés pour comprendre s’ils sont fondés. En effet, le décret précité précise seulement la nécessité d’avoir une attestation. Est-ce donc le fait de ne pas avoir d’attestation qui justifie la contravention ou le fait qu’elle soit mal rédigé ou encore les informations y figurants y soient inexactes ou parcellaires ?
Bien sûr qu’il faut, moralement même, respecter les consignes pour se protéger et protéger les autres, mais ce qui est légalement énoncé doit rester legal : Dura Lex, Sed Lex !
En tout cas et par curiosité intellectuelle, nous sommes preneurs de copies de ces procès-verbaux si certains en ont déjà reçus !
- Crime de guerre : « Assassinat, mauvais traitements ou déportation pour des travaux forcés, ou pour tout autre but, des populations civiles dans les territoires occupés, assassinat ou mauvais traitements des prisonniers de guerre ou des personnes en mer, exécution des otages, pillages de biens publics ou privés, destruction sans motif des villes et des villages, ou dévastation que ne justifient pas les exigences militaires ». Or il n'y a aucun fait de ce genre.
- Crime contre l'humanité : « violation délibérée et ignominieuse des droits fondamentaux d'un individu ou d'un groupe d'individus inspirée par des motifs politiques, philosophiques, raciaux ou religieux ». Cependant, « il n’y a pas, pour les crimes contre l’humanité, de définition généralement admise ». Or il n'y a ici aucun motif de ce genre.