L’employeur ne peut tolérer les violences au sein de son entreprise.

En l’espèce, il était reproché à un salarié, veilleur de nuit dans un hôtel, d’avoir sans raison agressé une collègue de travail.

Cette dernière aurait été étranglée et rouée de coups. La salariée a immédiatement porté plainte.

L’employeur a licencié le salarié accusé d’avoir fait preuve d’une telle sauvagerie.

Le problème est que les faits ont eu lieu en présence de peu de témoins et que l’employeur n’a pas attendu l’issue de la procédure pénale qui était en cours.

Il semble que l’employeur n’ait pas non plus mené une enquête interne afin de faire la lumière sur les faits.

Les seuls éléments dont disposait l’employeur était le dépôt de plainte ainsi que le certificat médical.

Le salarié licencié prétendait que sa collègue de travail était arrivée sur les lieux de travail en état d’ébriété et qu’elle avait perdu l’équilibre, ce qui a occasionné ses blessures.

Or, postérieurement au licenciement, il s’est avéré que la version du salarié licencié était de plus en plus vraisemblable.

Un salarié a pu attester que la victime était en réalité alcoolique et qu’elle avait régulièrement l’habitude d’être présente sur les lieux de travail dans un état d'ébriété.

Une autre salariée, présente sur les lieux au jour des faits, a pu également confirmer devant les services de police que la salariée prétendument agressée était souvent présente à l’hôtel en état d’ébriété, au point d’avoir été plusieurs fois sanctionnée pour cela.

Enfin, le Procureur de la république a classé sans suite la plainte de la prétendue victime en estimant que cette dernière avait causé son propre préjudice.

L’employeur n’étant pas en mesure de démontrer que les blessures de la salariée résultaient de violences, le licenciement a été déclaré comme étant sans cause réelle et sérieuse.

L’employeur aurait dû faire preuve de plus de prudence.

Nul ne peut contester que des faits de violences très graves imposent à l’entreprise de prendre des mesures immédiates afin de les faire cesser.

Mais agir immédiatement ne veut pas dire agir dans la précipitation.

Certes, l’employeur est en droit de ne pas attendre le résultat d’une procédure pénale en cours pour licencier le salarié suspecté de violences (Cass. soc., 13 déc. 2017, n° 16-17.193, publié au bulletin).

Toutefois, en cas de classement sans suite, d’ordonnance de non-lieu ou de décision de relaxe, le licenciement déjà prononcé risque d’être considéré comme étant sans cause réelle et sérieuse.

En revanche, l’employeur a la possibilité de prononcer une mise à pied conservatoire le temps de mener les investigations nécessaires ( Cass. soc., 13 sept. 2012, n° 11-16.434).

La Cour de cassation a même pu valider une mise à pied conservatoire dont la durée était calquée sur celle d'une procédure pénale en cours. Bien évidemment, les faits reprochés par l'employeur correspondaient à ceux faisant l'objet des poursuites pénales (Cass. soc., 4 déc. 2012, n° 11-27.508, publié au bulletin).

Il faut rappeler que la mise à pied conservatoire n'est pas une sanction en elle-même et qu'elle permet à l'employeur d'écarter de l'entreprise un salarié afin d'enquêter sur les faits reprochés. En pratique, il s'agit d'une mesure utilisée pour les faits les plus graves.

Par contre, si la faute n'est pas établie ou si l'employeur ne licencie pas pour faute grave (ou lourde), la période comprise dans la mise à pied conservatoire devra être rémunérée.

De plus, l’article L.1332-4 du Code du travail dispose également que :

« Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales. »

La prescription de deux mois pour sanctionner un salarié est interrompue lorsque les faits reprochés ont fait l’objet d’une procédure pénale.

Ce délai de deux mois recommence à courir à compter de la décision définitive de la juridiction pénale, ce qui laisse la possibilité à l’employeur d’attendre d’en savoir plus avant de prononcer un licenciement.