L’essence même d’une mise en demeure est de comporter un délai de paiement afin de laisser au débiteur un temps de réflexion et d’organisation.
La mise en demeure de l’URSSAF n’échappe pas à la règle et doit comporter expressément le délai dont dispose le cotisant pour s’acquitter de sa dette, ce que vient rappeler la Cour de cassation dans un arrêt récent (Cass. 2ème civ. , 19 décembre 2019, n° 18-23.623, F-P+B+I, Cassation).
Dans les faits, une société a fait l’objet d’un contrôle de la part de l’URSSAF.
L’URSSAF a ensuite décidé de procéder à un redressement de cotisations en délivrant une mise en demeure, laquelle ne comportait pas le délai dont disposait la société redressée afin de payer les cotisations ainsi que les majorations et pénalités de retard.
La société avait donc engagé un recours contentieux dans le but d’obtenir la nullité de la mise en demeure pour défaut de mention du délai de paiement.
La démarche n’est pas incongrue car le principe même d’une mise en demeure est de comporter un délai afin que le débiteur puisse régler sa dette.
La mise en demeure n’est pas une phase préparatoire au procès mais bien une formalité qui vise à éviter le contentieux. Une mise en demeure qui mettrait au pied du mur un adversaire sans lui laisser la possibilité d’éviter le litige ne serait d’aucune utilité. Pire, elle ne ferait qu’envenimer le conflit et favoriserait l’engorgement systématique des tribunaux.
De plus, ce délai de paiement fait partie du formalisme de la mise en demeure au titre de l’article L.244-2 du Code de la sécurité sociale.
Toutefois, dans le cas tranché par la Cour de cassation, la mise en demeure faisait mention des délais pour saisir la Commission de recours amiable de l’URSSAF.
On pouvait sérieusement se demander si la présence des délais de recours dans la mise en demeure pouvait compenser l’absence de mention des délais de paiement.
De plus, la mise en demeure faisait mention de l’article L. 244-2 du Code de la sécurité sociale, lequel précise bien, si l’on prend la peine de le consulter, que le cotisant dispose d’un délai d’un mois pour régler sa dette.
C’est sur la base de cette argumentation que la Cour d’appel de Versailles avait validé la mise en demeure délivrée par l’URSSAF.
Toutefois, la Cour de cassation casse l’arrêt rendu par la Cour d’appel au visa de l’article L. 244-2 du Code de la sécurité sociale (Cass. 2ème civ. , 19 décembre 2019, n° 18-23.623, F-P+B+I, Cassation).
Pour la Cour de cassation, la mise en demeure doit mentionner expressément le délai pour procéder au paiement de la dette de cotisations.
Cette mention doit figurer même en présence de la mention des délais de recours. Ces deux délais n’ont pas le même objet et ne peuvent se confondre.
Cette décision est on ne peut plus logique.
La mise en demeure de l’URSSAF est soumise à un formalisme strict et obligatoire, afin de respecter un minimum les droits de la personne redressée.
La mise en demeure de l’URSSAF n’a rien à voir avec une mise en demeure de la part d’un particulier ou d’une entreprise.
En effet, la mise en demeure de l’URSSAF est une décision dont les conséquences sont importantes. Elle peut faire l’objet d’un recours devant la Commission de Recours amiable, puis d’un recours devant le Pôle Social du Tribunal Judiciaire, avec le risque contentieux que cela comporte.
Également, ne pas contester la mise en demeure expose le cotisant à ce que le Directeur de l’URSSAF lui délivre une contrainte, qui, si elle n’est pas contestée, sera directement exécutoire comme un jugement.
Si le cotisant hésite à contester et souhaite payer la mise en demeure, il doit connaître à l’avance le délai qui lui est imparti pour y réfléchir. Cela lui permettra notamment de s’organiser et de prendre attache avec un avocat qui saura le conseiller utilement.
Une mise en demeure qui ne préciserait pas de délai pour régler la dette priverait le cotisant de ce temps de réflexion dont il aura besoin. L’absence de délai pourrait sous-entendre que la mise en demeure URSSAF doit être réglée immédiatement.
Or, toutes les mises en demeure de l’URSSAF ne sont pas forcément justifiées. La personne contrôlée par l’URSSAF est en droit pouvoir vérifier le bien-fondé de la mise en demeure afin d’être sûr de ne pas régler des cotisations indues.
Loin d’être une application stricte et rigide des textes, cette décision de la Cour de cassation ne fait que protéger un formalisme dont le seul but est de préserver les droits du cotisant. Ce formalisme est un garde-fou qui permet d’éviter que les redressements de l’URSSAF sombrent dans l’opacité et la déloyauté la plus totale.
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