Dans une impressionnante série d'arrêts du 6 juillet 2018, la Cour d'appel de Rennes sanctionne les vendeurs de panneaux photovoltaiques ainsi que les établissements de crédits, en prononçant l'annulation des bons de commande et crédit liés.

Ces décisions pourraient être l'amorce d'un véritable alignement des Cours d'appel sur les contentieux liés à la vente de panneaux photovoltaiques par démarchage.

Aux termes de pas moins d'une vingtaine d'arrêts rendus le même jour, la Cour d'appel de Rennes vient sanctionner avec force les pratiques souvent contestables des vendeurs de panneaux solaires par démarchage, et des établissements de crédit qui viennent leur prêter main forte en leur fournissant des contrats de crédits pré-rédigés à destination de consommateurs souvent mal informés sur leurs droits et pris au dépourvu.

Qui n'a en effet jamais reçu un appel, ou même la visite d'un démarcheur souhaitant lui vendre des panneaux solaires, et ses éventuelles accessoires que sont les pompes à chaleurs, les ballons thermodynamiques, les onduleurs et autres kit d'intégration ?

Certainement pas les propriétaires de maisons d'habitation, sur lesquelles peuvent être aisément posés des panneaux solaires.

Prenant acte des récents arrêts de la Cour de cassation, pour qui l'établissement de crédit ne peut plus se réfugier derrière sa méconnaissance des règles applicables au démarchage pour s'associer à des opérations mise en place à l'aide de documents irréguliers, voire parfois même falsifiés, la Cour d'appel de Rennes procède à une analyse détaillée de chaque affaire.

Dans la très grande majorité des cas, la Cour retient l'irrégularité des bons de commande, souscrits en contrariété avec les dispositions du Code de la consommation, pour prononcer la nullité du contrat de vente des panneaux photovoltaiques, laquelle entraîne de plein droit la nullité du crédit.

Puis, et c'est là le véritable apport de la jurisprudence, la Cour tire, comme conséquence quasi directe de la nullité de ce bon de commande, la faute de l'établissement de crédit, lequel est tenu, énonce la Cour, de vérifier la régularité apparente de l'opération.

Morceau choisi d'un de ces arrêts :

"...Or, il a été précédemment relevé que le bon de commande conclu le 30 janvier 2014 avec la société Climaciel, par l'intermédiaire de laquelle elle faisait corrélativement présenter ses offres de crédit, comportait des irrégularités formelles apparentes qui auraient dû conduire la société Domofinance, professionnel des opérations de crédit affecté, à ne pas se libérer des fonds entre les mains du fournisseur avant d'avoir à tout le moins vérifié auprès de Mme V. qu'elle entendait confirmer l'acte irrégulier.

Le prêteur n'avait certes pas à assister l'emprunteur lors de la conclusion et de l'exécution du contrat principal, ni à vérifier le bon fonctionnement d'une installation exempte de vice, mais il lui appartenait néanmoins de relever les anomalies apparentes du bon de commande et, dans le doute, de procéder alors aux vérifications adéquates auprès du fournisseur et de l'emprunteur pour s'assurer que le contrat principal n'était pas affecté d'une cause de nullité non couverte.


Il en résulte qu'en versant les fonds entre les mains du fournisseur, alors qu'elle aurait dû connaître les irrégularités affectant le bon de commande et sans procéder à des vérifications complémentaires sur l'éventuelle confirmation de l'acte, la société Domofinance a commis une faute la privant du droit d'obtenir le remboursement du capital emprunté. C'est donc à juste titre que le premier juge a débouté la société Domofinance de sa demande en remboursement du capital prêté, et le jugement sera également confirmé sur ce point."
 

Ce devoir de vérification implique donc désormais que la banque, en tant que professionnel des opérations de crédits, et disposant des compétences juridiques suffisantes pour examiner les contrats et attestations sur lesquels repose l'opération, procède à un examen in concreto à la fois formelle de l'opération, et effectif des prestations fournies.

Cela n'a rien d'illogique, tant il est vrai que jusqu'alors, les banques finançaient facilement, et à des conditions parfois très coûteuses, des opérations d'achat de panneaux photovoltaiques, sans toujours être regardante sur les conditions et modalités de celles-ci.

Or, de tels engagements, qui comporte des prêts à rembourser sur de nombreuses années pour les ménages, pèsent considérablement sur le taux d'endettement des emprunteurs.

L'impact des ces arrêts de la Cour d'appel de Rennes n'est pas à négliger.

En effet, tant par leur nombre, que par la force des solutions retenues, la Cour d'appel de Rennes (notamment Cour d'appel de l'ensemble des tribunaux de Bretagne et de Loire-Atlantique) marque certainement le début d'un alignement des Cour d'appel en cette matière, lesquelles s'en remettaient jusqu'ici, et avant la récente intervention de la Cour de cassation, à leur pouvoir souverain d'appréciation.

La solution est heureuse pour les acheteurs de panneaux photovoltaiques victimes de pratiques trompeuses ou abusives, pour qui un régime juridique de plus en plus protecteur et unifié semble se mettre en place.

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