OPPOSITION A MARIAGE PAR LE MINISTERE PUBLIC : QUE FAIRE?

 

  • D'ou vient l'opposition à mariage?

Selon l’article 171-4 du Code Civil :

« Lorsque des indices sérieux laissent présumer que le mariage envisagé encourt la nullité au titre des articles 144, 146, 146-1, 147, 161, 162, 163, 180 ou 191, l'autorité diplomatique ou consulaire saisit sans délai le procureur de la République compétent et en informe les intéressés.

Le procureur de la République peut, dans le délai de deux mois à compter de la saisine, faire connaître par une décision motivée, à l'autorité diplomatique ou consulaire du lieu où la célébration du mariage est envisagée et aux intéressés, qu'il s'oppose à cette célébration.

La mainlevée de l'opposition peut être demandée, à tout moment, devant le tribunal de grande instance conformément aux dispositions des articles 177 et 178 par les futurs époux, même mineurs ».

Selon l’article 175-1 du Code Civil :

« Le ministère public peut former opposition pour les cas où il pourrait demander la nullité du mariage ».

Depuis 1993, le ministère public dispose d’un droit d’opposition à mariage.

Le Ministère public peut exercer ce droit lors d’une célébration en France mais aussi à l’étranger.

En effet, lorsque deux personnes, dont l’une au moins est française, envisagent de se marier à l’étranger, elles doivent remplir certaines conditions et accomplir certaines formalités pour que le mariage soit valable en France.

A la suite du mariage d’un ressortissant français à l’étranger, le mariage doit être transcrit dans les registres de l’état civil consulaire par l’ambassadeur ou le consul de France territorialement compétent.

Si il existe un doute sur l’intention matrimoniale entre les époux, un contrôle sera effectué par le Ministère

Ce dernier pourra s’opposer à la retranscription du mariage sur les registres de l’état civil français.

Ce droit d’opposition peut être exercé dans tous les cas où il existe un empêchement dirimant, sanctionné par une nullité absolue.

Par ailleurs, depuis 2006, le Ministère public peut faire Opposition à mariage dans un cas de nullité relative à savoir : l’absence de liberté du consentement.

C'est donc sur la base de ces articles que le Procureur de la République, et notamment le Procureur de la République de Nantes, se fonde lorsqu'il fait opposition à un mariage.

Il doit, en principe, faire apparapître sur l'opposition les éléments qui motivent sa décision.

Les effets de l’opposition à mariage sont différents selon que l’opposition soit bien ou mal fondée.

Si l’opposition est bien fondée, elle empêchera par la suite le mariage, au contraire si elle est mal fondée, elle retardera le mariage jusqu’à la mainlevée de l'opposition.

Depuis le 1er mars 2007, date d'entrée en vigueur de la loi du 14 novembre 2006 relative au contrôle de la validité des mariages, la mainlevée judiciaire sera le seul mode susceptible d'être mis en œuvre lorsque l'opposition sera faite par le ministère public.

En France, la jurisprudence en matière d’opposition à mariage par le ministère public est très abondante en première instance et en appel.

A l'inverse, il y a peu d'arrêts de cassation sur la question, certainement en raison du fait que ces espèces relèvent la plupart du temps, et sauf erreur de procédure flagrante, de l'appréciation souveraine des juges du fond.

 

  • Comment prouver l'intention matrimoniale?

Prenons pour exemple la jurisprudence de la Cour d'appel de Rennes, qui est le second degré de juridiction après le Tribunal de Grande Instance de Nantes, et qui juge des appels formés contre les décision de ce Tribunal de Grande Instance de Nantes.

Récemment plusieurs jugements n’autorisant pas la mainlevée de l’opposition à mariage  ont été rendus en première instance. 

Ces jugements ont été infirmés par la cour d’appel de Rennes.

La cour d’appel infirmait ces jugements au motif qu’il existait une réelle intention matrimoniale entre les couples.

Dans un arrêt rendu le 10 septembre 2018[1], M.X de nationalité marocaine et Madame Y de nationalité française , avaient sollicité la délivrance d’un certificat de capacité à mariage auprès des services de l’état civil consulaire en vue de la célébration de leur mariage au Maroc.

Le 23 juin 2009, ils ont reçu une opposition à mariage par le procureur de la République, en application de l’article 171-4 du code civil, fondée sur « de sérieux doutes sur la relation d’une relation affective entre les deux personnes, et une forte suspicion d’arrangement pour permettre à M.X de se réinstaller en France après expulsion.

Le tribunal de première instance s’était opposé à la mainlevée de l’opposition à mariage.

Les futurs époux avaient interjeté-appel.

Les appelants avaient versés au débat des attestations précises et circonstanciées de membres des deux familles qui côtoient régulièrement le couple, dont il résulte l’existence d’une vie commune réelle, à Casablanca, ayant conduit à la naissance de leur fille, reconnue à la naissance par ses deux parents.

La cour d’appel de Rennes infirmait le jugement au motif qu’aucun élément ne permettait de douter de la véritable intention matrimoniale des appelants.

Par ailleurs, dans un autre arrêt rendu le 28 janvier 2019[2], la cour d’appel infirmait le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Nantes, en précisant les contours de l’intention matrimoniale.

Selon la cour d’appel de Rennes :

"les attestations qui témoignent de l’existence d’une relation de couple harmonieuse depuis plus d’un an et demi, l’attestation de paiement de la Caisse d’Allocations familiales sur laquelle les deux noms du couple figurent, la déclaration d’impôts à leur deux noms ainsi que la souscription d’un contrat d’assurance habitation, et de fourniture d’énergie au deux noms permettent d’établir la réalité de leur vie commune et la sincérité de leur intention matrimoniale. "

La cour d’appel prend donc en considération pour ordonner la mainlevée de l’opposition les témoignages qui attestent d’une vie commune.

La cour d’appel de Rennes rappelle[3] que la charge de la preuve d’un défaut d’intention matrimoniale repose sur le Ministère public.

De plus, elle s’appuie sur plusieurs indices pour retenir l’existence d’une réelle intention matrimoniale.

Selon la cour d’appel de Rennes, l’existence de contacts réguliers entre le couple, de nombreux appels téléphoniques, l’apport d’une aide financière entre le couple et  le projet de s’installer ensemble témoignent d’une réelle intention matrimoniale[4].

Par ailleurs, la cour d’appel rejette la mainlevée d’un opposition à mariage, lorsque l’intention matrimoniale est insuffisante selon elle.

Contactez nous au 02.40.89.00.70. Notre cabinet intervient, au travers de Maître Charlyves SALAGNON Avocat, sur tous vos dossiers d'opposition à mariage.


[1] cour d’appel, Rennes, 6e chambre A, 10 septembre 2018- n°17/03119

[2] cour d’appel, Rennes,  6e chambre A, 28 janvier 2019 -  n°17/07174

[3] cour d’appel de Rennes, 6ème chambre A, 18 février 2019 n°18-01206

[4] cour d’appel de Rennes, 6e chambre A, 17 décembre 2018 n°17/08158