Un créancier ne peut pas engager de nouvelles mesures d’exécution contre son débiteur s’il n’est pas mis fin au plan de surendettement

 

Cass. 2e civ., 9 janv. 2020, n° 18-19846

 

I) Qu’est-ce que le surendettement ?

 

Le surendettement est la situation dans laquelle un particulier n’arrive plus à faire face à l’ensemble de ses dettes, charges. Il faut distinguer le surendettement actif, lié à une accumulation de crédits, du surendettement passif, lié à des événements de la vie telle que la perte d’un emploi.

 

Le législateur est venu aménager la protection des emprunteurs surendettés à l’aide de procédure de surendettement (qui ne concerne que les emprunteurs de bonne foi).

 

La solution ici contestée précise que le créancier doit attendre la fin du plan de surendettement pour recouvrer sa créance.

 

II) Qu’est-ce que le plan conventionnel de redressement ?

 

Lorsque le dossier de surendettement est recevable, un plan conventionnel de redressement est élaboré dans l’objectif de diminuer le poids de la dette du débiteur.

 

Le plan peut comporter plusieurs mesures : le rééchelonnement d’une ou plusieurs dettes, des remises de dette, la réduction du taux d’intérêt, etc. Afin de déterminer les mesures à imposer, la commission doit prendre en compte les dépenses inévitables (frais de santé, alimentation…) du débiteur.

 

Un accord est alors recherché entre le surendetté et ses créanciers. En l’absence d’accord, le débiteur peut demander à la commission de recommander ou d’imposer certaines mesures.

 

  • Les parties disposent de quinze jours pour contester les mesures imposées. Sans contestation, elles seront appliquées directement. Les mesures imposées interdisent aux créanciers d’exercer des procédures d’exécution à l’encontre des débiteurs pendant leur durée d’exécution.

 

  • De leur côté, les mesures recommandées doivent être homologuées, c’est-à-dire approuvées, par le juge afin d’être appliquées.

 

  • Lorsque des mesures imposées et recommandées sont prévues par la commission, l’ensemble de ces mesures doit être validé par le juge.

 

  • Cette homologation judiciaire a été supprimée le 1er janvier 2018 par la loi. Les décisions prises par la commission de surendettement sont désormais exécutoires sans homologation.

 

La durée du plan ne peut excéder sept ans.

 

III) Quelles sont les conséquences du non-respect du plan de surendettement ?

 

  • Sur la phase amiable du plan conventionnel de redressement

 

En cas de non-respect du plan conventionnel de redressement, l’article R732-2 du code de la consommation prévoit sa caducité quinze jours après une mise en demeure restée infructueuse.

 

Le 7 juillet 2005, il a été jugé par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation (03-17.535) que la caducité s’opère de plein droit : « les créanciers recouvrent alors leur droit de poursuite individuelle sans avoir à saisir au préalable le juge de l’exécution ».

 

  • Sur les mesures homologuées par le juge

 

Pour les mesures recommandées homologuées, la loi ne prévoit pas la caducité de plein droit.

 

La deuxième chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt du 23 septembre 2004, a permis aux créanciers de recouvrer leur droit de poursuite individuelle sans saisie préalable du juge de l’exécution si le plan de redressement non exécuté prévoyait une clause de caducité (Cass. 2e civ., 23 sept. 2004, n° 02-13.856).

 

En l’absence d’une telle clause, l’arrêt de la deuxième chambre civile en date du 9 janvier 2020 (n° 18-19846) est venu apporter des précisons :

 

Si un débiteur n’exécute pas les mesures recommandées homologuées, la banque doit attendre la fin du plan pour pratiquer des mesures d’exécution, de nouvelles poursuites.

La fin du plan se fait soit par une décision du juge soit par l’effet d’une clause résolutoire prévue par ces mesures ou par l’ordonnance les homologuant.

 

IV) Le rejet de la déchéance du terme par la Cour de cassation

 

En l’espèce, un juge d’un TI avait homologué, à la demande d’un débiteur, les mesures recommandées par une commission de surendettement au sujet d’un prêt. À la suite du non-paiement d’une échéance du plan, la banque du débiteur avait :

  • dénoncé le plan,
  • prononcé la déchéance du terme (consiste à mettre fin du contrat de prêt et d’exiger le remboursement immédiat du solde),
  • fait délivrer au débiteur un commandement à fin de saisie-vente (acte d’huissier donnant un délai de huit jours au débiteur pour s’acquitter de sa dette, à défaut, l’huissier pourra procéder à la saisie)

 

Le débiteur a alors voulu obtenir l’annulation du commandement de payer à fin de saisie-vente, ce à quoi la Cour d’Appel s’est opposée. Les juges du fond ont considéré que l’ouverture d’une procédure de surendettement n’interdisait pas au créancier de se prévaloir de la déchéance du terme pendant la validité du plan.

 

Les juges de droit ont donné tort à la banque en énonçant que le non-respect du plan de surendettement n’entrainait pas son annulation et ne lui permettait pas d’engager des poursuites contre le débiteur.

 

La banque ne pouvait pas se prévaloir de la mise en demeure et de la dénonciation du plan. A défaut d’une clause résolutoire insérée dans les mesures recommandées de la commission, elle devra obtenir une décision du juge.

 

V) Comment s’intègre cette solution dans le droit en vigueur ?

 

Cette décision est une application logique de l’ancien article L331-9 du code de la consommation, devenu L. 733-16 du même code (depuis l’ordonnance de 2016). Cet article prévoit que les créanciers auxquels les mesures imposées par la commission ou celles prises par le juge sont opposables ne peuvent exercer des procédures d'exécution à l'encontre des biens du débiteur pendant la durée d'exécution de ces mesures.

 

En raison de la suppression de l’homologation du juge, l’article L.733-16 du code de la consommation reprend les dispositions de l’article L331-9 mais ne fait pas référence à l’intervention du juge pour rendre les mesures imposées et recommandées exécutoires.

 

Cette solution s’inscrit indubitablement dans le sens d’une protection des intérêts légitimes du débiteur.

 

Maître SALAGNON, Avocat associé au sein du cabinet BRG Avocats (Nantes-Paris), et responsable du département droit économique, droit de la consommation, droit des contrats, vous conseille, vous assiste et vous accompagne sur toute la France concernant vos litiges et procédures.

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